Porosité du réel
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Porosité du réel
Un dimanche matin, il y a quelques semaines j'écoutai l'émission "les racines du ciel" de Frédéric LENOIR et Nelly AMBARD. Frédéric LENOIR contait l'histoire d'un sage qui chaque matin donnait à ses disciples une sentence à méditer. Il allait l'énoncer quand un oiseau lui coupa la parole par un chant merveilleux. Le sage l'écouta et quand l'oiseau s'envola il conclut que la sentence avait été énoncée et proposa de la méditer, en silence... Frédéric LENOIR proposa également que l'émission se conclua par le même silence; ce qu'il fit en se taisant également.
Pour apprécier le sel de ce qui va suivre, il faut savoir qu'au bout d'une heure mon poste de radio s'éteint de lui-même, automatiquement. Au moment même où le silence s'instaurait par décision du conférencier le poste s'éteignit ... mais je ne m'en aperçu qu'au moment où le silence s'éternisant, j'activai de nouveau le contact.
Ce qui me semble extraordinaire dans ce récit est la coïncidence des silences qu'aucune décision ni causalité ne permettait d'anticiper. Carl Gustav JUNG a inventé le concept de synchronicité pour tenter d'expliquer la concomitance d'évènements que rien pourtant ne permet de prévoir.
Je préfère y voir, quant à moi, l'émergence d'une réalité plus profonde à consonance universelle, en complémentarité/opposition aux évènements particuliers qu'elle englobe. Par porosité intrinsèque deux modes de réalité inter-agissent pour finalement n'en faire qu'une en laissant entrevoir que l'Eveil n'est pas extérieur au monde empirique, pas plus d'ailleurs qu'à notre sensibilité.
Pour apprécier le sel de ce qui va suivre, il faut savoir qu'au bout d'une heure mon poste de radio s'éteint de lui-même, automatiquement. Au moment même où le silence s'instaurait par décision du conférencier le poste s'éteignit ... mais je ne m'en aperçu qu'au moment où le silence s'éternisant, j'activai de nouveau le contact.
Ce qui me semble extraordinaire dans ce récit est la coïncidence des silences qu'aucune décision ni causalité ne permettait d'anticiper. Carl Gustav JUNG a inventé le concept de synchronicité pour tenter d'expliquer la concomitance d'évènements que rien pourtant ne permet de prévoir.
Je préfère y voir, quant à moi, l'émergence d'une réalité plus profonde à consonance universelle, en complémentarité/opposition aux évènements particuliers qu'elle englobe. Par porosité intrinsèque deux modes de réalité inter-agissent pour finalement n'en faire qu'une en laissant entrevoir que l'Eveil n'est pas extérieur au monde empirique, pas plus d'ailleurs qu'à notre sensibilité.
Tai Gaku- Messages : 41
Date d'inscription : 07/10/2014
Age : 84
Localisation : Ici et Nulle part
Double Vérité
Cette réalité émergente à consonnance universelle a toujours été présente mais nos habitudes de vie nous interdisent de nous en apercevoir car nous sommes "prisonniers" de nos points de vue et opinions auquels nous croyons dur comme fer.
Ainsi donc notre réalité est elle-même biaisée par notre regard influencé par nos opinions réifiées et devenues croyances. Quelqu'elles soient il est logique et cohérent de dire qu'elles n'échappent pas à la quotidienneté dans laquelle elles s'insèrent. Cependant, elles n'acquièrent pas pour autant une "qualité" que d'aucuns pourraient qualifier de "divine" ou "surnaturelle" en fonction de leur propre compréhension.
Il est donc cohérent de soutenir la "double vérité" telle que formulée par NAGARJUNA dans les Madhyamaka-karikas
24, 8 – C’est en prenant appui sur deux vérités que les Bouddhas enseignent la Loi, d’une part la vérité conventionnelle et mondaine, d’autre part la vérité de sens ultime
Ainsi donc notre réalité est elle-même biaisée par notre regard influencé par nos opinions réifiées et devenues croyances. Quelqu'elles soient il est logique et cohérent de dire qu'elles n'échappent pas à la quotidienneté dans laquelle elles s'insèrent. Cependant, elles n'acquièrent pas pour autant une "qualité" que d'aucuns pourraient qualifier de "divine" ou "surnaturelle" en fonction de leur propre compréhension.
Il est donc cohérent de soutenir la "double vérité" telle que formulée par NAGARJUNA dans les Madhyamaka-karikas
24, 8 – C’est en prenant appui sur deux vérités que les Bouddhas enseignent la Loi, d’une part la vérité conventionnelle et mondaine, d’autre part la vérité de sens ultime
Tai Gaku- Messages : 41
Date d'inscription : 07/10/2014
Age : 84
Localisation : Ici et Nulle part
Re: Porosité du réel
L'insistance mise sur l'instant présent m'a semblé tout d'abord un peu exagérée mais à la réflexion il m'a semblé qu'on ne pouvait s'en passer.
Je me souviens d'autres forums où l'accent était également mis sur le présent et je pense désormais qu'il est à la base de toute pratique et réflexion dont le souvenir me reviendra quand j'en aurais le temps.
En attendant me reviennent les derniers vers du Sandokai de Maître Sekito :
Vous qui cherchez le voie,
Ne perdez pas l'instant présent
Je me souviens d'autres forums où l'accent était également mis sur le présent et je pense désormais qu'il est à la base de toute pratique et réflexion dont le souvenir me reviendra quand j'en aurais le temps.
En attendant me reviennent les derniers vers du Sandokai de Maître Sekito :
Vous qui cherchez le voie,
Ne perdez pas l'instant présent
Shakti- Messages : 6
Date d'inscription : 10/10/2014
Re: Porosité du réel
Pendant les vacances je participai à une petite sesshin de zazen. Nous avions décidé que, pendant la méditation, une horloge sonnerait toutes les 2 minutes et demie de manière à rappeler l'écoulement du temps linéaire quelque soit par ailleurs l'état de zazen réalisé par chacun des participants.
A un moment totalement indéfinissable, j'ai réalisé que l'écoulement du temps s'accélérait et que se rapprochaient l'une de l'autre les deux sonneries, comme si le temps conventionnel était débordé par une réalité temporelle différente que nous avons déja nommée universelle et qui tendait à l'annuler.
Il n'y a pas lieu d'en tirer de conclusions définitives et, quelque soit la nature du temps, cette perception ne fut possible que dans l'immédiateté de l'instant présent conçu comme évènement particulier. En toute occurence elle répond aux préconisations du Sandokai ainsi qu'à le sentence du Maître Rinzai HAKUIN (1685-1768) selon laquelle "Un moment d'absence (...équivaut à...) un homme mort" -
A un moment totalement indéfinissable, j'ai réalisé que l'écoulement du temps s'accélérait et que se rapprochaient l'une de l'autre les deux sonneries, comme si le temps conventionnel était débordé par une réalité temporelle différente que nous avons déja nommée universelle et qui tendait à l'annuler.
Il n'y a pas lieu d'en tirer de conclusions définitives et, quelque soit la nature du temps, cette perception ne fut possible que dans l'immédiateté de l'instant présent conçu comme évènement particulier. En toute occurence elle répond aux préconisations du Sandokai ainsi qu'à le sentence du Maître Rinzai HAKUIN (1685-1768) selon laquelle "Un moment d'absence (...équivaut à...) un homme mort" -
Tai Gaku- Messages : 41
Date d'inscription : 07/10/2014
Age : 84
Localisation : Ici et Nulle part
Histoire de rencontre?
Cette synchronicité me rappelle une histoire (certes légèrement romancée, mais qui ne le fait pas dans ce genre d'histoire?...). C'est un collègue (devenu depuis un ami, mais pour d'autres raisons) qui me racontait cela, il y a quelques mois.
Un jour de rentrée (c'est un enseignant), alors qu'il découvre les visages qui allaient devenir ces collègues pour l'année en cours, il retrouve celui d'une collègue de formation avec qui il avait été "en classe" l'année précédente, et avec qui il s'entendait plutôt bien. Il se trouve qu'ils s'étaient perdu de vue pendant l'été, elle devant partir à l'autre bout de la France (mutation) et lui devant rester dans le coin. Le hasard fit bien les choses puisqu'elle obtint au dernier moment (pour raison familiale) de rester "dans le coin" justement pour une année supplémentaire. Le hasard des affectations firent qu'ils se retrouvèrent dans le même établissement. L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais pas eux. Ils ont commencé à se fréquenter et, bien sûr, ils n'en restèrent pas à une simple amitié entre collègue... Cela fait désormais plus de 10 ans qu'ils sont ensemble, ils ont des gamins et une quantité de projets d'avenir...
Quelle probabilité avaient-ils tous deux de se retrouver de cette façon? Et de s'apercevoir que "ça colle entre nous"? Et que leur réserve l'avenir (à eux et à leurs enfants)? Tout cela ne se poserait même pas s'il n'y avait eu de concours de circonstance chanceux et une dose de "synchronicité"...
Un matheux (dont je suis entre parenthèse) dirait qu'il s'agit simplement d'un événement probable. Que parmi la foule de couples potentiels qui auraient du se former de cette façon, mon couple d'amis serait Le Couple qui a eu les circonstances pour, et qui permet de dire "on a 1% de chance que cela arrive". Dans le premier message de la discussion, Tai Gaku qui a vu s'éteindre la radio à l'instant précis du silence du présentateur serait ainsi l'Équivalent de ce couple chanceux de mon histoire : un cas statistique favorable, purement et simplement.
Voilà pour l'explication "scientifico-scientifique". Elle n'apporte rien, ni n'enlève rien à l'événement unique et particulier vécu par son témoin. La question demeure de savoir pour quelle(s) raison(s) profonde(s) les rencontres ont eu lieu ?
Un jour de rentrée (c'est un enseignant), alors qu'il découvre les visages qui allaient devenir ces collègues pour l'année en cours, il retrouve celui d'une collègue de formation avec qui il avait été "en classe" l'année précédente, et avec qui il s'entendait plutôt bien. Il se trouve qu'ils s'étaient perdu de vue pendant l'été, elle devant partir à l'autre bout de la France (mutation) et lui devant rester dans le coin. Le hasard fit bien les choses puisqu'elle obtint au dernier moment (pour raison familiale) de rester "dans le coin" justement pour une année supplémentaire. Le hasard des affectations firent qu'ils se retrouvèrent dans le même établissement. L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais pas eux. Ils ont commencé à se fréquenter et, bien sûr, ils n'en restèrent pas à une simple amitié entre collègue... Cela fait désormais plus de 10 ans qu'ils sont ensemble, ils ont des gamins et une quantité de projets d'avenir...
Quelle probabilité avaient-ils tous deux de se retrouver de cette façon? Et de s'apercevoir que "ça colle entre nous"? Et que leur réserve l'avenir (à eux et à leurs enfants)? Tout cela ne se poserait même pas s'il n'y avait eu de concours de circonstance chanceux et une dose de "synchronicité"...
Un matheux (dont je suis entre parenthèse) dirait qu'il s'agit simplement d'un événement probable. Que parmi la foule de couples potentiels qui auraient du se former de cette façon, mon couple d'amis serait Le Couple qui a eu les circonstances pour, et qui permet de dire "on a 1% de chance que cela arrive". Dans le premier message de la discussion, Tai Gaku qui a vu s'éteindre la radio à l'instant précis du silence du présentateur serait ainsi l'Équivalent de ce couple chanceux de mon histoire : un cas statistique favorable, purement et simplement.
Voilà pour l'explication "scientifico-scientifique". Elle n'apporte rien, ni n'enlève rien à l'événement unique et particulier vécu par son témoin. La question demeure de savoir pour quelle(s) raison(s) profonde(s) les rencontres ont eu lieu ?
Misterjuju- Messages : 1
Date d'inscription : 10/10/2014
Points de vue
Les deux évènements rapportés illustrent parfaitement la synchronicité et conduisent à la notion d'incertitude fondatrice. Dans chacun d'eux aucun élément particulier connu ne permet de prévoir ce qui a été en final constaté et il est cohérent d'émettre une/des hypothèses justifiant ce constat, par exemple cette incertitude.
Là encore, le point de vue que l'on partage est fondateur. Si notre vision du monde la fait dépendre d'un dieu créateur omniscient et infini, il est cohérent de ne pas la comprendre car elle dépend de sa sagesse infinie postulée pour justifier notre incompréhension, sagesse à laquelle nous ne pouvons avoir accès de par notre "finitude".
Si par contre, nous estimons que l'Univers trouve sa fin en lui-même et s'exprime de multiples façons infinies, que cette expression passe également par nous mais pas seulement, que le temps linéaire dans lequel nous nous mouvons n'est qu'une modalité temporelle, il est admissible de penser que notre façon habituelle de le poser est entaché de partialité et empêche la perception de l'Esprit vaste.
En fait, nous nous étonnons parce que nous sommes attachés à notre esprit borné, souvent confondu avec l'intelligence, et que cette attachement nous voile le Réel pour qui l'interférence des temps ne se pose pas.
Là encore, le point de vue que l'on partage est fondateur. Si notre vision du monde la fait dépendre d'un dieu créateur omniscient et infini, il est cohérent de ne pas la comprendre car elle dépend de sa sagesse infinie postulée pour justifier notre incompréhension, sagesse à laquelle nous ne pouvons avoir accès de par notre "finitude".
Si par contre, nous estimons que l'Univers trouve sa fin en lui-même et s'exprime de multiples façons infinies, que cette expression passe également par nous mais pas seulement, que le temps linéaire dans lequel nous nous mouvons n'est qu'une modalité temporelle, il est admissible de penser que notre façon habituelle de le poser est entaché de partialité et empêche la perception de l'Esprit vaste.
En fait, nous nous étonnons parce que nous sommes attachés à notre esprit borné, souvent confondu avec l'intelligence, et que cette attachement nous voile le Réel pour qui l'interférence des temps ne se pose pas.
Tai Gaku- Messages : 41
Date d'inscription : 07/10/2014
Age : 84
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